Nucléaire : La fusion sous condition permettrait de distinguer expertise et décision ?

Dans l’opposition au nucléaire et le monde qui va avec, il reste intéressant de se pencher sur les évolutions du monde du nucléaire même si nous n’en attendons pas grand-chose.
Parmi les rares sabots qui puissent freiner les envies frénétiques de l’État de maintenir voire de relancer l’industrie nucléaire en France, les décisions de l’ASN et les recherches de l’ISRN qui, séparées, augmentent la capacité de détecter les anomalies du nucléaire (sans évidemment considérer que l’industrie nucléaire est une anomalie en tant que telle...)

Il n’est pas question ici de fusion nucléaire mais bien de la fusion entre deux organes dit "de sureté du nucléaire", l’ASN et l’IRSN en une ASNR. Ooops, rebaptisée AISNR avec un I en plus pour indépendante car il suffit que ce soit inscrit dans le nom pour en faire une réalité (sic).

Si on ne peut guère compter sur ces structures pour empêcher le nucléaire d’empoisonner nos vies, leur séparation et notamment la capacité de chacune de s’appuyer sur des expertises non limitées aux siennes, d’enquêter (IRSN) sans se limiter aux requête du décisionnaire (ASN) a quand même permis d’éviter quelques monstruosités... dont le démarrage de l’EPR de Flamanville dont l’ombre plane de plus en plus dangereusement... en attente d’une décision de l’ASN !

Évidemment, il faudrait demander à ces experts si la mise à l’arrêt de réacteurs fin 2021 suite à des fissures et des défauts de corrosion sous contraintes aurait été la même, ou leur demander si l’EPR de Flamanville ne serait donc pas déjà en route malgré toutes ses malfaçons.

La réponse semble être là :
« La fusion mettra fin aux frictions entre ASN et IRSN et aux différences de priorisation, source de délais dans la prise de décision » (Pascal Martin, sénateur rapporteur du projet de loi sur la fusion ASN-IRSN).

D’ailleurs, un des points de friction n’est-il pas sur la possibilité de mettre en route le nouveau programme nucléaire du gouvernement sans attendre le retour d’expérience de celui de Flamanville ?

Et si on créait une fusion entre police et justice, en gardant évidemment les tribunaux d’un côté et les commissariats de l’autre pour ne pas tout mélanger mais en les intégrant à une structure commune ? Il est bien probable que les décisions de justice en découlant mettraient moins en rogne les flics qui considèrent que la justice sabre souvent leur travail baclé...

En attendant, le Sénat a voté la fusion. Le texte revient devant l’Assemblée nationale où il devrait être rapidement mis à l’ordre du jour pour une fusion programmée au 1er janvier 2025.

Faut-il espérer un nouveau vote contre le projet comme ce fut le cas en mars 2023 ?

MaJ du 22 mars 2024  : C’est à une voix près, 260 députés contre 259, que le projet de loi relatif à la gouvernance de la sûreté nucléaire a été approuvé par l’Assemblée nationale le 19 mars 2024. C’est la fameuse loi de fusion controversée de l’ASN, organe de contrôle, et de l’IRSN, chargé de l’expertise technique. La rédaction définitive du texte doit se faire (normalement) le 3 avril 2024 en commission paritaire avant que celui ne soit adopté dans la foulée...

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